1) INTRODUCTION :
Le Certificat Médical Initial (CMI), dit aussi certificat médico-légal, est un élément de preuve du dommage corporel subit par une victime chaque fois qu'il y a eu un traumatisme, même minime, pouvant mettre en cause la responsabilité d'un tiers. C’est un acte courant de la pratique médicale qui engage la responsabilité de son auteur et qu’il faut rédiger avec soin et prudence. Il doit être effectué après l’examen clinique d’une victime de violence ou d'accident, le jour même ou le plus précocement possible. Tout médecin inscrit au conseil de l’ordre, quelque soit sa spécialité, peut rédiger ce certificat.
Outre la description précise et détaillée de toutes les lésions constatées, le rédacteur doit également signaler s'il y a, du fait des lésions, une Incapacité Totale de Travail (ITT) et dans ce cas d'en préciser la durée. C'est de cette durée que va dépendre la hiérarchie de la procédure judiciaire. La peine infligée au responsable des lésions ne sera pas forcement proportionnelle à l'ITT, il y a d'autres facteurs que le juge prenne en considération.
En France, la Haute Autorité de Santé (HAS) [1] a fait paraître, en 2011, des recommandations de bonnes pratiques concernant la rédaction et le contenu de ces certificats. C’est une étape importante pour standardiser les conduites mais la définition de l’ITT en pénal reste confuse et sa détermination est subjective. Plusieurs auteurs [2][4][5] ont souligné la nécessité de réviser cette notion par les juristes.
II. À qui est destiné le CMI ?
Le CMI est demandé soit par la victime elle-même (ou son tuteur s'il s'agit d'un mineur) soit par une autorité judiciaire sur réquisition écrite. Destiné aux magistrats lors des procédures pénales et civiles. Il est important de noter que le certificat médical descriptif des lésions ne sera délivré qu'à la victime elle-même, son représentant légal s’il est mineur ou, en cas de réquisition, à l'autorité judiciaire et toujours dans une enveloppe cachetée. Il n'est pas destiné ni à l'employeur ni à la compagnie d'assurance. La remise d’un certificat à un tiers (conjoint, parent, ...) est une violation du secret professionnel.
- En droit commun : coups et blessures volontaires (ou involontaires), agressions sexuelles, sévices sur enfants ou handicapés. Le CMI permettra à la victime de prouver l'existence de son dommage. La durée de l'ITT, la nature des lésions et les circonstances des faits permettront aux magistrats de qualifier le fait dommageable de délit ou crime et de déterminer par conséquent la nature des poursuites.
- En droit civil : lorsque le fait dommageable ne donne pas lieu à des poursuites pénales (accidents de la route ou de travail par exemple), le certificat permettra à la victime de prouver l'existence de dommage corporel et de demander indemnité.
III. Le médecin est il obligé de délivrer un CMI ?
- Le code de déontologie médicale exprime une règle de portée générale : «l'exercice de la médecine comporte normalement l'établissement des certificats dont la production est prescrite par les textes législatifs ou réglementaires». En outre, «le médecin expert ne peut être, en même temps, le médecin traitant du même malade».
- Les textes de loi du droit commun prévoient la réquisition du médecin qui devient un auxiliaire de justice. La réquisition est écrite et formulée comme une injonction (ordre) de la loi. Le requérant peut être un officier de police judiciaire, le procureur ou un juge d’instruction. La réquisition nominative est une obligation, le refus entraine des poursuites judiciaires.
- Pour les accidents du travail et les maladies professionnelles : il existe des textes réglementaires spécifiques. C'est à l'employeur d'établir le formulaire de déclaration de l'accident. Le médecin décrit les lésions et précise la durée d'arrêt de travail. Normalement le CMI sera complété par une prolongation et/ou par un certificat de guérison.
- Hors les cas prévus par la loi ou par une réquisition, rien n'oblige un médecin à rédiger un certificat. Le médecin peut se soustraire de cette obligation en cas de force majeure (urgence de soins à un autre malade ou inaptitude technique). Cependant, il est difficile d'admettre que le médecin qui a donné les premiers soins au malade refusera de lui bénéficier d'un certificat descriptif des lésions constatées. Il pourrait y avoir une faute civile à priver le patient d'une preuve nécessaire. Donner un CMI est donc un devoir moral et social envers le patient.
IV. CMI et responsabilité du médecin :
- Le code de déontologie médicale : interdit la délivrance d'un rapport tendancieux ou d'un certificat de complaisance, c'est une faute grave qui peut entraîner des poursuites administratives. Le médecin est appelé aussi à respecter le secret médical envers le patient.
- Responsabilité pénale : le code pénal interdit toute attestation ou certificat faisant état à des faits matériellement inexacts. La faute est plus grave lorsque le médecin bénéficie, en dehors de ses honoraires, des avantages en espèce ou en nature de la part de la victime.
- Responsabilité civile : Le médecin peut être responsable lorsque ses constatations ne sont pas réelles (majoration ou minoration de la réalité). Il peut être poursuivi par la victime comme par la partie adverse.
- Dans tous les cas, le médecin doit respecter le secret médical. Il ne relève que la description des lésions et ne répond qu'aux questions posées. Il n'est pas recommandé de signaler un état d'ivresse constatée, une toxicomanie ou des antécédents psychiatriques sauf si la question est posée clairement par l'autorité judiciaire.
- Le signalement de la maltraitance aux autorités administratives ou judicaires est obligatoire, indépendamment du CMI. La maltraitance à enfant de moins de 18 ans ou envers des personnes handicapés vulnérables est toute violence physique ou psychique, abus sexuel ou négligence grave.
- Bonne tenue du dossier médical : noter tous les détails de l'examen clinique, les examens complémentaires et les avis éventuels des spécialistes avec mention des dates et de l'heure de ces examens. On doit garder toujours une copie du CMI délivré, une copie de la réquisition judiciaire ou de la déclaration de l'accident du travail. Le dossier médical peut être perquisitionné par les autorités judiciaires en cas d’affaire pénale. Le patient a le droit de réclamer, par le biais d'une ordonnance sur requête, une photocopie intégrale de son dossier médical.
V. Comment rédiger un CMI ?
Le certificat médical initial doit être écrit avec précision, lisiblement, en français (ou la langue officielle du pays éventuellement) et de préférence dactylographié. Son contenu est le suivant :
1. Identification du médecin : Nom et prénoms, spécialité, adresse professionnelle et éventuellement le numéro d'inscription au conseil de l'ordre des médecins.
2. Identification du patient : Nom et prénoms, date de naissance, vérifier la pièce d'identité ou écrire «certifie avoir examiné le patient qui déclare être nommé XY»
3. Date de l'examen initial et l’heure.
4. Doléances du patient, ces sont les faits rapportés par l’interrogatoire du patient concernant la date, les circonstances (violence, accident de la route ou autre) et les mécanismes du traumatisme (coup de poing ou de pied, chute, plaie par arme tranchante, par objet contondant,...). Le médecin mentionne les dires du patient sans aucune interprétation personnelle. On peut utiliser des formules comme «d’après les déclarations du patient» ou «d’après ses dires».
5. L'examen médical détaillé : il ne s’agit pas d’un diagnostic tout court mais d’une description détaillée de lésions constatées à l'examen initial, et distinctement les signes évolutifs lorsque la rédaction est faite à une date ultérieure.
6. L'ITT : nombre des jours en toutes lettres de l'incapacité totale de travail en ajoutant «sauf complications ultérieures». Il est possible de faire une réévaluation à distance. Dans certains cas il est impossible de déterminer l’ITT (personnes dépendantes, nourrissons, etc.).
7. Terminez par «Certificat délivré à l'intéressé en mains propres» ou références de la réquisition s'il y a lieu ou nom du représentant légal si le patient est mineur.
8. La date de rédaction du certificat.
9. La signature et le cachet du médecin : Le certificat doit se terminer obligatoirement par la signature manuscrite du médecin.
VI. Comment décrire les lésions ?
Le médecin note l'état général du patient, l'état de conscience, ainsi que les principales tares éventuelles, puis il s'attache à préciser la nature exacte des lésions observées : plaies, abrasions ou érosions cutanées, ecchymoses, hématomes, œdème, fracture, brûlures...etc. Il en mesure la taille, il en décrit la forme, la couleur, la profondeur, le siège exact par rapport à des points anatomiques précis (droit ou gauche).
Il faut noter les signes psychologiques manifestes et préciser le retentissement fonctionnel, ce que le patient ne peut pas faire ou fait avec gêne.
Le juge comprendra bien si vous lui parlez d'une «plaie de 6 cm à la face antérieure du genou droit, interdisant la flexion et imposant l'utilisation de béquilles» ou «ne permettant qu'une marche grevée de boiterie» etc. Mais une «plaie de 6 cm nécessitant 5 points de suture au genou» ne lui apporte pas les mêmes informations [10] |
Toutes les lésions observées doivent être décrites, même si a priori, elles apparaissent bénignes et sans intérêt.
Les résultats des examens para cliniques importants effectués, tels que des radiographies, peuvent être ajoutés. Si devant des difficultés dans le diagnostic ou dans la thérapeutique, un avis d'un spécialiste a été sollicité, il doit être aussi noté.
Éviter les mots techniques spécialisés ou mettre une explication entre parenthèses pour les juges. Éviter surtout les abréviations (écrivez plutôt traumatisme crânien, fond d'œil, os propre du nez et non pas TC, FO, OPN !). Pour les dents préciser s'il s'agit d'une incisive, molaire, supérieure, inférieure, gauche ou droite et non simplement son numéro. |
VII. Comment évaluer l'ITT ?
Le certificat médical initial donne une indication très importante. Il s'agit de l'appréciation de la durée d'une éventuelle incapacité totale de travail (ITT), nommé par les non médicaux "jours de repos".
L'ITT au sens pénal est une notion jurisprudentielle qui n'est pas définie dans le code pénal. DURIGON la définit comme «Durée de la période pendant laquelle la victime de violence ne peut remplir la totalité des fonctions basiques normales de la vie courante du fait de son état : habillement, déplacement, toilettes,...». Cette dénomination est confuse en absence d’une définition législative précise.
L'incapacité totale de travail est une traduction quantitative, exprimée en nombre de jours, d'un état descriptif détaillé dans les certificats médicaux de violences. Elle recouvre le retentissement non pas seulement physique mais psychique aussi.
L'incapacité totale de travail suppose donc l'existence d'un traumatisme (douleur ou handicap, visible ou non) perturbant de façon anormale les actes de la vie courante, sans pour autant les prohiber.
Les peines sont en principe d'autant plus lourdes que les conséquences des violences seront plus graves. Mais le juge reste souverain, il peut tenir compte en plus de l'ITT, d'autres facteurs aggravants ou atténuants les peines. Ces notions nous obligent à réfléchir et à ne donner une durée d'incapacité que d'une façon très objective, exacte et juste.
Il n'existe aucun consensus ou barème d'évaluation de l'ITT. On observe ainsi de grandes disparités entre médecins dans la fixation des ITT pour un même type de lésion traumatique, voire parfois pour un même médecin [2][3]. Il faut tenir compte de la nature des lésions initiales, de la durée d'hospitalisation, de l'existence d'une immobilisation (plâtre, résine), de la nécessité d'une aide pour les gestes ordinaires de la vie quotidienne.
L’évaluation initiale de l’ITT n’est jamais définitive. Selon les examens complémentaires ou une aggravation tardive on peut toujours refaire un certificat pour prolonger la durée, mais il paraît difficile de la diminuer.
L'ITT n'est pas une notion médicale mais juridique, elle n'a rien à voir avec l'arrêt de travail, elle est la même pour un enfant, un retraité ou un chômeur. L'ITT n'implique pas l'impossibilité pour la victime d'accomplir certaines tâches (se déplacer, se nourrir, se laver, faire ses courses, travailler) mais une gêne au moment de ces tâches. Ainsi, pour une entorse de l'index, l'ITT sera égale à l'immobilisation (celle-ci entraînant l'impossibilité d'écrire, de couper sa viande), elle sera identique chez le cadre et chez le travailleur manuel. Une fracture du nez entraîne une gêne, mais n'empêche pas de travailler. L'estimation de la durée de l'ITT en pénal concerne le retentissement somatique fonctionnel et aussi psychologique des lésions consécutives au traumatisme subit. Dans les accidents du travail l’ITT correspond au nombre de jours de repos permettant de calculer l’indemnité. |
Il ne faut pas confondre avec l’incapacité permanente partielle (IPP) qui se définit comme la réduction définitive de la capacité fonctionnelle de la victime après consolidation, exprimée par rapport à sa capacité fonctionnelle juste avant la survenue de l’évènement causal. L’IPP en % est évaluée à la guérison par les experts selon un barème.
VIII. Notions juridiques :
Le juge reste maître de la qualification de l’infraction, le CMI n’est qu’un indice. Les circonstances, l’arme en cause, l’âge de la victime et le lien de parenté avec l’agresseur (conjoint, ascendant, descendant, ..) sont des facteurs déterminants dans la procédure judiciaire. L’IPP fixée par les experts a plus de poids que l’ITT.
À titre d’exemple en France :
- une ITT inférieure à 8 jours dans le cas d’une violence est une contravention. En cas de circonstances aggravantes c’est un délit. Les peines seront plus lourdes.
- lorsque l’ITT est supérieure à 8 jours c’est un délit.
- dans le cadre d’un accident de la route la barrière n’est pas 8 mais 90 jours.
- une IPP supérieure à 20% en cas de coups et blessures volontaires est un crime.
Références bibliographiques :
©2018 Dr Mounir Gazzah - efurgences
ANNEXE (attention: ce n'est pas un consensus !)
Il ne s'agit que des exemples :
Source: Certificat médical descriptif d’une victime de violence volontaire, Dr Frank QUESTEL, urgences-serveur.fr
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